Cet article est le premier d’une nouvelle série faisant suite à une précédente série de 4 articles consacrée aux douleurs en lien avec les articulations sacro-iliaques chez les sujets souffrant de lombalgie chronique :
https://www.kinefact.com/troubles-musculo-squelettiques/examen-sacro-iliaques-1
Aide à la relecture : Marguerite Dontenwille
Abréviations :
ASI : articulation(s) sacro-iliaque(s)
DSI : douleur(s) en lien avec les articulations sacro-iliaques
DPPG : douleurs pelviennes postérieures en lien avec la grossesse
Epidémiologie et classification des douleurs pelviennes en lien avec la grossesse
Les douleurs lombo-pelviennes en lien avec la grossesse constituent une affection qui concernerait 45% des femmes enceintes et 25% des femmes en post-partum [1].
Les douleurs pelviennes postérieures en lien avec la grossesse (DPPG) en sont une sous-catégorie. Le tableau douloureux est similaire à celui que l’on a décrit pour les patients souffrant de douleurs lombo-pelviennes persistantes en lien avec les ASI : douleurs uni ou bilatérales, localisées au massif fessier et pouvant irradier à la face postérieure ou latérale de la cuisse jusqu’au genou ainsi que dans l’aine. En revanche, contrairement à ces derniers les femmes enceintes peuvent expérimenter des douleurs en lien avec la symphyse pubienne, seules ou en association avec les douleurs postérieures.
Bien que l’on suspecte que plusieurs structures anatomiques soient simultanément impliquées dans ces douleurs, on ignore encore desquelles il s’agit précisément (muscles, ligaments, surfaces articulaires …) ainsi que leur contribution relative [2, 3]. Afin de rendre compte de cette incertitude et de la possible implication de plusieurs structures, il y a consensus autour du terme générique de « douleurs en lien avec le pelvis » [1, 4]. Le mécanisme physio-pathologique exact est également inconnu, même si une coïncidence de facteurs à la fois hormonaux et biomécaniques est suspectée [5].
Le pronostic de ces douleurs est favorable : la plupart des femmes récupèrent de leurs DPPG en moins d’un an (dans 93% des cas, les douleurs disparaissent dans les 3 mois), mais 8 à 10% de ces femmes semblent néanmoins conserver des douleurs persistantes et ce jusqu’à 2 ans après la grossesse [1, 5, 6].
Dans la mesure où leur pronostic et leur prise en charge n’est pas la même, il est nécessaire de distinguer les douleurs en lien avec le pelvis des douleurs en lien avec le rachis qui peuvent coexister par ailleurs lors de la grossesse (Figure 1). En effet, les femmes souffrant du pelvis uniquement sont plus sévèrement invalidées et ont des scores de douleur plus élevés que celles souffrant de douleurs lombaires uniquement. Les patientes les plus invalidées sont celles souffrant à la fois de douleurs pelviennes et lombaires [5].
Il est par conséquent recommandé, comme dans le cas des DSI chez les sujets souffrant de lombalgie chronique, d’exclure d’abord une implication lombaire [4].
Figure 1 :
Différenciation clinique des douleurs lombo-pelviennes en lien avec la grossesse
Parmi les douleurs en lien avec le pelvis, il semble possible de distinguer au moins 5 phénotypes en fonction des sites douloureux [7], dont 2 seulement n’incluent que les structures postérieures du pelvis (Figure 2).
Figure 2 :
Phénotypes de douleurs pelviennes en lien avec la grossesse [7]
Enfin, il est bien sûr nécessaire d’évaluer précocement la présence de signes d’alertes (drapeaux rouges) qui pointeraient vers la présence d’une pathologie sérieuse sous-jacente (Figure 3).
Diagnostics différentiels de douleurs pelviennes et lombaires en lien avec la grossesse | |
Infection des voies urinaires | Ostéoporose associée à la grossesse |
Ostéomyélite | Thrombose veineuse fémorale |
Conflit disco-radiculaire | Ostéite pubienne |
Arthrose du rachis / de la hanche | Rupture de la symphyse pubienne |
Sténose lombaire | Sciatalgie |
Syndrome de la queue de cheval | Complications obstétriques (accouchement prématuré, rupture, nécrobiose d’un fibrome utérin, douleur du ligament rond, infection intra-amniotique) |
Figure 3 :
Traduit de [5]
Suite de cet article : Parties 2 et 3 (Tests) :
Tests pour les douleurs pelviennes postérieures en lien avec la grossesse (Partie 2)
Tests pour les douleurs pelviennes postérieures en lien avec la grossesse (Partie 3)
Série précédente sur les DSI dans le cadre de la lombalgie chronique :
Références : par ordre d’apparition dans le texte
- Wu WH, et al. Pregnancy-related pelvic girdle pain (PPP), I: Terminology, clinical presentation, and prevalence. Eur Spine J. 2004 Nov;13(7):575-89
- Ostgaard HC, Zetherström G, Roos-Hansson E. The posterior pelvic pain provocation test in pregnant women. Eur Spine J. 1994;3(5):258-60
- Gutke A, et al. Posterior pelvic pain provocation test is negative in patients with lumbar herniated discs. Eur Spine J. 2009 Jul;18(7):1008-12
- Vleeming A, et al. European Guidelines for the Diagnosis and Treatment of Pelvic Girdle Pain. Eur Spine J. 2008;17(6):794–819
- Vermani E, Mittal R, Weeks A. Pelvic girdle pain and low back pain in pregnancy: a review. Pain Pract. 2010 Jan-Feb;10(1):60-71
- Kanakaris K, Roberts CS, Giannoudis PV. Pregnancy-related pelvic girdle pain: an update. BMC Med. 2011 Feb 15;9:15
- Albert H, Godskesen M, Westergaard J. Evaluation of clinical tests used in classification procedures in pregnancy-related pelvic joint pain. Eur Spine J. 2000;9(2):161–166.
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